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Journal de guerre de Jean Bousquet 1914-1919. Cliquez ici pour voir tous les messages les uns sous les autres...
19 février 2014

31 - Premières permissions

  Au début de juillet l'on organisa les premières permissions, le mot organisa est peut-être de trop, mais elles commencèrent .
 Je fis partie du 1er convoi. Nous nous sommes mis en route jusqu'à Essex-les-Nancy.

 Les différents régiments furent rassemblés dans la cour d'une caserne d'Essex. Nous devons présenter nos titres de permission à des gendarmes qui pointent nos noms sur une liste.

  Nous sommes conduits en détachement à Nancy et dirigés sur la gare de marchandises. De là par groupes sous la garde d'un gradé responsable nous prenons place dans des wagons accrochés à un train de ravitaillement (R.Q. : ravitaillement quotidien).

 Mais au lieu de prendre la direction de Paris, c'est à dire filer sur la droite en quittant Nancy, le train part vers la gauche. Nous marchons lentement, il y a plusieurs manoeuvres pour les aiguillages. Dans la nuit nous restons deux heures en panne sur la voie. Vers les 7 heures du matin nouvel arrêt en pleine campagne.

 Enfin après être passé à Vittel, Langres, nous arrivons à la tombée de la nuit à Dijon. Les vivres de déplacement n'étaient pas prévues, aussi à nos frais nous pouvons nous restaurer dans les restaurants du pays. Nous sommes rassemblés pour passer la nuit dans une salle de spectacle, un petit casino où nous nous étendons par terre sur nos capotes ou couvertures.

 Le lendemain nous prenons cette fois le P.L.M. avec Paris comme direction. Nous n'avons mis que deux jours pour aller de Nancy à Paris, mais nous y sommes. Heureusement que le temps passé pour le déplacement ne doit pas compter sur la durée de la permission.

 Pour les poilus de mon régiment, qui eux allaient à Mont-de-Marsan, Pau ou la Charente-Inférieure, je me demande le temps passé dans les trains !

 A Paris au cours de mes promenades, je vais voir dans la cour des Invalides les trophées boches, les "Taubs" leurs premiers avions de chasse, leurs 77 et aussi un obus de gros calibre, un 420 intact.

DSCN8159

 

1915 - Paris - Musée des Invalides - "Taubs et 77"

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1915 - Paris - Invalides 77 boches avecleurs caissons.

 Pour ma part je m'étais constitué avec des têtes d'obus et différents souvenirs boches, un petit musée personnel, éparpillé depuis de tous côtés.

DSCN8161

 

1915 - Paris - Avenue Bosquet chez mes parents. Souvenirs de guerre.

 Le retour de cette permission s'est fait également par la gare de Lyon, mais le trajet a été moins long. Il y a eu cependant plusieurs haltes assez longues.

 En arrivant au point de départ j'ai constaté que les boches avaient quelque peu marmité la ferme Saint-Jean.

 Des obus étaient tombés dans l'après-midi du 14 juillet.

 Les hommes de la Compagnie étaient à ce moment au repos et venaient de descendre du grenier et de quitter la grange où ils se tenaient habituellement soit pour dormir soit pour nettoyer leurs armes ou y passer des revues d'effets. Ils venaient de se rassembler dans le jardin où des petits jeux étaient organisés à l'occasion de la fête nationale ; jeux de quilles, courses en sac, jeu du baquet etc... les obus boches arrivent justement dans leur cantonnement, ne causant aucun accident mais se contentant de trouer le mur face à Mazerulles de 4 obus dont l'un dans la toiture.

 C'est un pur hasard qu'il n'y ai eu aucun blessé, car il restait habituellement dans le cantonnement des hommes finissant de ranger leurs affaires ou écrivant leur lettre, ou alors des exempt de service. Ce jour là il n'y avait absolument personne.

 Le tir continua encore un peu, mais les obus allèrent plus loin sans causer de dommage. Les hommes purent finir leurs jeux sans autre ennui que d'avoir leur cantonnement exposé aux courants d'air et un peu à la pluie.

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La ferme Saint-Jean après le bombardement du 14 juillet 1915.

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Vue prise du grenier.

 Nous nous sommes souvent demandé pourquoi les boches n'ont jamais eu l'idée de démolir entièrement cette ferme qu'ils apercevaient pourtant de loin. Sa façade blanche donnant sur les lignes était un beau point de repère. Nous logions là comme si nous avions été loin du front et pourtant nous étions bien à une portée de canon ! D'autres pays beaucoup plus éloignés et ayant un cachet moins militaire étaient moins épargnés que nous.

 Les avions qui survolaient la cour de la ferme pouvaient nous voir à loisir. Au début nous faisions des tirs d'ensemble sur eux en pure perte il est vrai.

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1915 - Le Commandant Du Mesnil en convalescence à Nancy. 

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